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[Fsfe-france] Milice ! Ouvrez !


From: Christophe Espern
Subject: [Fsfe-france] Milice ! Ouvrez !
Date: Tue, 27 Apr 2004 13:07:15 -0000
User-agent: KMail/1.5.4

Milice ! Ouvrez !

Communiqué de presse EUCD.INFO, pour diffusion immédiate

Paris le 26 avril 2004 - Dans le cadre de ses activités, l'initiative 
EUCD.INFO suit avec attention l'évolution du projet de loi transposant la 
directive 95/46 CE relative à la protection des données personnelles. Ayant 
pris connaissance des travaux de la commission de l'Assemblée Nationale qui 
prépare l'examen en seconde lecture de ce projet de loi, l'équipe juridique 
d'EUCD.INFO dénonce une tentative de détournement de la loi Informatiques et 
Libertés visant à autoriser la création de milices privées. 

Le 13 avril dernier, dans le cadre de la préparation de l'examen en seconde 
lecture du projet de loi transposant la directive 95/46 CE relative à la 
protection des données personnelles, la Commission des Lois de l'Assemblée 
Nationale a retenu l'amendement 8 proposé par son rapporteur, le député 
Françis Delattre (UMP). Pièce rapportée de dernière minute, sans doute 
proposée sous la pression du lobby des industries culturelles (CLIC), cet 
amendement a pour but d'autoriser le traitement automatisé d'infractions, de 
condamnations et de mesures de sûretés aux sociétés de gestion collective de 
droits d'auteur et de droits voisins comme la SACEM, la SCPP, la SPPF, ou le 
SNEP. 

Ces sociétés semblent donc sur le point d'obtenir ce qu'elles réclament depuis 
plusieurs années : le droit de traquer et de contacter les utilisateurs de 
réseaux P2P qu'elles estiment contrefacteurs, et ce à l'aide de systèmes 
informatiques dédiés. L'idée est de voir si on peut régler le problème du P2P 
sans médiation judiciaire ou policière. L'identification du suspect est faite 
à partir de son adresse IP et requiert, tout comme la collecte des "preuves", 
la mise en oeuvre de techniques dites "spéciales" (sonde logicielle, 
croisement de bases de données nominatives, écoutes de télécommunications, 
agents sous couverture). Les informations collectées sont ensuite utilisées 
pour rappeller l'internaute à l'ordre en le menaçant de sanctions pénales. 

C'est exactement cette activité que la CNIL a refusé à la SACEM en 2001 et 
qu'elle a signalé comme illégale en début d'année dernière à certains acteurs 
privés qui commençait à s'y livrer. Jusqu'à présent, le traitement automatisé 
d'infractions est en effet réservé, dans le cadre de leurs attributions 
légales, aux institutions judiciaires, aux services de police et à certaines 
personnes morales exerçant une mission de service public. La recherche 
d'éléments de preuves à l'aide de techniques spéciales est elle exclusivement 
réservée aux services de polices agissant dans le cadre d'une commission 
rogatoire. C'est ce qu'on appelle de la recherche pro-active d'infractions. 
Les techniques mises en oeuvre pour faire ce type de recherche sont 
particulièrement attentatoires à la vie privée et mettent à mal les droits de 
la défense.  

Les données collectées dans le cadre de la constitution d'un fichier 
d'infractions sont ainsi soumises à un régime spécifique. Le dernier alinéa 
de l'article 27 de la loi Informatiques et Libertés permet au gestionnaire du 
fichier de se soustraire à l'obligation d'information prévue par ce même 
article, dès lors que les information collectées le sont dans le but de 
réaliser un fichier d'infractions. Cette asymétrie entre les prérogatives 
accordées au gestionnaire du fichier et l'atteinte résultante aux droits de 
la personne fichée explique pourquoi les traitements automatisés visant à 
collecter des éléments de preuves sont réservés à la justice et à la police. 
C'est d'ailleurs tout le sens de l'article 7 de la directive 95/46 CE qui 
précise que le traitement de données à caractère personnel ne peut être 
effectué par des acteurs privés sans autorisation de l'intéressé  que si "ne 
prévalent pal'intérêtêt ou les droits et libertés fondamentaux de la personne 
concernée", et ce indépendamment du fait que le gestionnaire du fichier 
poursuive un intérêt légitime.

Dès lors, en cherchant à transférer une mission de police judiciaire à des 
acteurs privés, et en leur autorisant l'utilisation de techniques 
habituellement mises en oeuvre par des officiers de police judiciaire dans le 
cadre d'enquêtes liées à la pédophilie, au terrorisme ou au trafic de drogue, 
l'amendement Delattre se heurte à cette disposition de la directive 95/46 CE. 
Il porte en effet atteinte à des droits protégés par les articles 6 et 8 de 
la Convention Européenne des Droits de l'Homme ainsi que par les articles 7 
et 8 de la Charte des Droits Fondamentaux de l'Union Européenne. Semblant 
faire du droit d'auteur un droit supérieur à tous les autres, le député 
Delattre propose en fait, au nom de la lutte contre la contrefaçon, de 
piétiner les droits fondamentaux des internautes et les principes prévalant 
dans un État de droit. 

L'initiative EUCD.INFO a donc d'ores et déjà pris contact avec différentes 
parties susceptibles de saisir le Conseil Constitutionnel si jamais cet 
amendement était adopté le 29 avril prochain par l'Assemblée Nationale.

À propos de EUCD.INFO:

 EUCD.INFO est une initiative créée par la FSF France (Fondation pour le 
Logiciel Libre) dont la mission est d'informer sur les conséquences sociales 
et économiques de la directive européenne du 22 mai 2001 relative au droits 
d'auteurs et aux droits voisins dans la société de l'information (surnommée 
EUCD). Grâce à une levée de fonds elle finance les travaux d'une équipe de 
juristes dirigée par Cyril Rojinsky. Elle entend ainsi permettre une 
transposition de l'EUCD qui préserve l'exception de copie privée en 
particulier et l'intérêt des auteurs et du public en général. EUCD.INFO est 
représentée dans treize pays de l'union européenne et a vocation à fédérer 
les organismes français dont les intérêts pourraient être lésés par une 
transposition hâtive de l'EUCD. 

Contacts Presse : 


  Christophe Espern. E-mail : address@hidden
  Tél : 06 63 00 47 41

  Frédéric Couchet. E-mail : address@hidden
  Tél : 06 60 68 89 31




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